Une nouvelle rubrique sur tantquil! Un panorama international du maintien de l’ordre.
Cette rubrique a pour objectif de faire une présentation rapide de ce qu’est le « maintien de l’ordre », a l’échelle internationale.
En quoi consiste-il ? Quelles sont ses fonctions ? Comment évolue-t-il ? Le budget qui lui est consacré est il soumis au même impératif économique d’austérité que le reste des dépenses des Etats ?
Comprendre les mécanismes du « maintien de l’ordre » est, dans cette période de crise et de (probables) affrontements qui s’ouvre, une nécessité.
Il s’agit ainsi de démonter les discours qui le sous-tendent ( dissociation casseurs/bon manifestants, discours délirant sur les « agents provocateurs anarchistes infiltrés », les « faux étudiants », « faux lycéens », « faux chômeurs », etc.).
Chaque force de police a ses particularités et ses méthodes. Par exemple les policiers anti-émeute hollandais utiliseront des petits boucliers ronds en osier alors que les français auront des boucliers carrés en plexiglas et les policiers allemands se passeront carrément de boucliers. Néanmoins, on peut dégager plusieurs grands modèles de maintien de l’ordre. Ici, le modèle allemand.
L’Allemagne, du fait de l’histoire, a une conception différente de la répression et a fait un choix de maintien de l’ordre complètement différent des méthodes françaises.
Créée en grande partie pour répondre à la tactique du Black Bloc, sa doctrine repose sur le concept d’overkill, c’est-à-dire un déploiement massif de forces, allant jusqu’à plusieurs fois le nombre nécessaire de troupes pour encadrer une foule.
La théorie allemande repose tout d’abord sur une identification claire des portions de foules perçues comme menaçantes (ce qui n’est pas trop difficile dans le cas d’un Black bloc). Leur identification va permettre un très fort encadrement de celles-ci. Une première tactique va être d’éviter la réunion physique de manifestants ou du moins de les ficher et de les contrôler extensivement. Cela peut passer par la mise en place de dispositifs de contrôle de type check-point pour accéder au lieu de la manifestation. Ils peuvent se trouver dans des gares ferroviaires, routières ou même des portions d’autoroute. Par exemple, le 3 avril 2009, les forces de police allemande vont jusqu’à fermer complètement l’autoroute permettant d’accéder à Baden-Baden où une manifestation a lieu. De même, elles peuvent tenter d’empêcher différents cortèges d’accéder au lieu de rassemblement d’une manifestation.
Une fois sur les lieux, la forte présence policière tend à intimider les manifestants. Pour y accéder, ils peuvent être soumis à des contrôles d’identité en amont de la manifestation. Ensuite, le dispositif policier encadre les manifestants. Cela peut aller jusqu’à un cordon de police entourant intégralement les manifestant (voir photo) comme par exemple lors des manifestations anti G-8 à Rostock en juin 2007. Le parcours est balisé et physiquement bloqué (par des barrières anti-émeutes), et les intersections systématiquement occupées par des unités des police voire des canons à eau blindés. De plus les cortèges de manifestants perçus comme dangereux sont systématiquement filmés tout au long du parcours.
Lorsqu’il y a affrontement, la police utilise des méthodes assez différentes de ce que l’on peut voir en France. Les grands axes sont contrôlés par des canons à eau blindés. Ils empêchent physiquement les manifestants de passer et de plus, grâce à leurs lances à incendie, ils peuvent projeter de l’eau mêlée à des produits chimiques (lacrymogènes ou irritants) avec une très forte pression. Le reste du combat est assuré par des charges massives de policiers anti-émeutes. Ceux-ci n’ont pas de boucliers et sont assez vulnérables aux projectiles. Les gaz lacrymogènes ainsi que les charges de chevaux peuvent être utilisés de manière occasionnelle.
On peut voir que la doctrine allemande est basée principalement sur des mesures préventives d’intimidation des manifestants par un contrôle des flux de population et un déploiement policier massif. Cette tactique est assez efficace contre un nombre limité de manifestants mais peut rapidement montrer ses limites dans le cas de manifestations massives et dispersées sur le territoire. Par ailleurs, une fois que les affrontements éclatent, la tactique de la police allemande fait que celle-ci peut rapidement être débordée par les manifestants. Pour conclure, on pourra dire que la méthode allemande est plus oppressive que répressive, basée sur l’intimidation numérique et le fichage extensif.