Qu’est ce que c’est … Le salaire indirect ?

C’est ce qui nous est payé sous l’appellation « cotisations sociales ». Mais vous n’en entendrez pas parler en ces termes sur BFMTV. Forcément, les patrons appellent ça les « charges ». Et réclament à cor et à cri d’en être exonérés… Ce qui revient à ne pas nous verser tout notre salaire ! Charmant programme. Une petite explication s’impose.

On a souvent tendance à penser que le salaire c’est juste ce qu’on touche en net à la fin du mois, ce que l’on appelle le salaire direct, ou salaire net. En même temps c’est assez logique, si on part du point de vue d’un salarié qui lit sa fiche de paie.  Le moyen le plus simple pour comprendre la répartition entre salaire direct et indirect est de se mettre dans la peau d’un patron. Prenons donc comme exemple Richard, le patron de Dominique. Dominique travaille toujours dans une usine de montres de luxe …

Chaque mois, Richard verse 2500 € pour payer Dominique. Sur cette somme, 1500 € finissent directement dans la poche de Dominique, c’est son salaire net.  2500-1500= 1000. La part de salaire indirect que paie Richard, c’est donc 1000 €.

Salaire direct

1500€

Salaire indirect : cotisations « salariales » et patronales

1000€

Salaire total

2500€

Du coup, les 1000€ qui restent c’est quoi ?

Dans le langage courant, on dissocie deux catégories de cotisations: les cotisations salariales et patronales. En fait, les deux forment les cotisations sociales dont une partie serait payée par le patron (patronale) et l’autre par le salarié (salariale). Mais cette distinction n’est que théorique. Quand on regarde nos fiches de paie, on peut s’imaginer que notre travail coûte au patron ce qu’on appelle le salaire brut (salaire net + part salariale des cotisations sociales).

Mais le salaire brut est un leurre, le salarié ne paye aucune partie des cotisations sociales. C’est le patron qui, en réalité, paye l’intégralité des cotisations sociales. D’ailleurs, eux ne se font pas d’illusion et entre eux ils parlent de salaire « super brut », c’est-à-dire le salaire net + l’ensemble des cotisations sociales (salaire indirect). Soit le prix d’achat de notre force de travail, le salaire total en somme.origami-billet-1-dollar-renard

Mais pourquoi les patrons payent les cotisations sociales ?

Ces dernières permettent de financer une partie de la reproduction de la force de travail, c’est-à-dire, tout ce qui fait que le salarié est en capacité de vendre sa force de travail et de fabriquer des nouveaux travailleurs pour demain. Par ailleurs, ces dispositifs ne sont développés que dans certains pays européens. Aux USA, dans les pays émergents, au Japon, c’est le salarié qui paye directement son assurance maladie et qui finance sa retraite.

Donc, concrètement ces cotisations servent à quoi? Et pourquoi appelle-t-on ça du salaire indirect?

Elles servent à alimenter différentes caisses, qui gèrent :

La sécurité sociale,

Les retraites.

L’assurance chômage.

La CAF.

Ce qui veut dire des choses aussi diverses que le régime de l’Assurance-chômage, le fonds national d’aide au logement, le fonds de solidarité vieillesse, le fonds CMU, le régime retraite complémentaire et prévoyance des employés de maison etc. etc.

Les patrons paient ces cotises à l’URSSAF ( qui veut justement dire « Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales »)

Pourquoi et comment la bourgeoisie attaque les salaires indirects ?

Pour les patrons, le fait de nous payer est en soi une charge. Elle figure dans ce qu’ils appellent « les coûts de production ». Alors pour ne pas baisser de suite le salaire net, parce que ça se voit et que les prolos gueuleraient, autant le faire sur le salaire indirect. Ça tombe bien, c’est exactement le programme du gouvernement PS pour la rentrée 2013! On laisse la parole à notre ministre de l’économie :

« Nous ne pouvons pas continuellement avoir des charges sociales qui pèsent sur le travail. »

Pierre Moscovici, juillet 2012, le Monde.

C’est que s’attaquer aux salaires indirects c’est… Moins direct, justement. Moins visible. Cela crée un déficit des différentes caisses, et ceux sont en définitive victimes de ces attaques sont aussi ceux parmi les prolos qui sont les plus vulnérables, les plus précaires, les chômeurs, les allocataires de la CAF, qui se voient radiés pour un rien, qui voient leurs droits se réduire…

Et oui, rogner sur les cotisations sociales se répercute sur toutes nos vies. Ça veut dire une plus grande part de nos salaires directs pour aider la famille, pour border pépé, attendre plus longtemps pour se soigner, ou encore moins de thunes lorsqu’on perdra notre boulot.

Bien sûr diront certains, Richard (le patron) peut choisir de répercuter la baisse du salaire indirect, en augmentant le salaire direct… C’est vrai ? Mouais, sauf que ce statut existe, il s’appelle l’auto-entreprenariat, les salariés sont payés par le patron direct tout net, sans cotises… Et n’ont clairement pas décroché le jackpot !

Et puis, on voit ce que ça donne dans d’autre pays, comme aux USA, où des millions de personnes sont privées de la moindre couverture maladie : on estime que plus de 60% des banqueroutes privées sont dûes à des problèmes de santé là-bas.

C’est que l’absence de sécu rend super cher le moindre pépin : à coup de 150 $ la consultation au médecin, ou une prise de sang, sans compter qu’aucun hôpital ou médecin américain n’accepte de vous soigner à moins que vous soyez à l’article de la mort,  si vous ne pouvez présenter une carte de crédit ou une prise en charge d’assurance.origami-billet-1-dollar-cochon

En un mot, le système américain, c’est soit ton patron te paie ton assurance maladie (une forme de salaire indirect) … Soit c’est vraiment la misère, si tu restes trop longtemps au chômage, ou que tu trouves un travail moins bien payé, là tu dois payer tout seul… Et ça douille.

Alors qu’aux USA, (hormis les “filets de sécurité” type medicare ou medicaid ) c’est en général à l’échelle de l’entreprise que les prolétaires peuvent bénéficier de salaires indirects, la situation est différente en France et dans d’autres pays Européens.

En effet un des résultats de cette forme de salaire indirect, (via les cotisations sociales), c’est de toucher le prolétariat à une échelle beaucoup plus large. Car de cette manière, via les différentes caisses (CAF, Chômage, Sécu etc. ) beaucoup de monde en bénéficie.

On peut même dire que d’une certaine manière, les capitalistes nous paient en bloc, achètent globalement notre force de travail, et l’utilisent lorsqu’ils en ont besoin. D’ailleurs, tout est fait pour qu’en échange des différentes aides, nous soyons à la merci des besoins patronaux, avec par exemple l’obligation pour un chômeur d’accepter n’importe quelle offre d’emploi.

L’étape d’après, on la voit venir un peu partout en Europe, avec la crise. C’est le travail forcé, en échange des aides sociales. C’est alors une attaque encore plus massive puisqu’il s’agit tout bonnement de nous forcer à bosser en échange du versement… De la partie de notre salaire que l’on ne nous avait pas versé directement ! Faut avouer que c’est fortiche ! Je mets une partie de ton salaire sur un compte bloqué, et pour y avoir accès… Faut bosser à l’œil ! Mais on vous en parlera plus en détail prochainement.

En attendant, gardons que lorsque les patrons parlent de charges, ils nous traitent tout simplement de boulets. Pourtant, ce sont les prolétaires qui produisent tout.

Et si aujourd’hui on a bien raison de pas se laisser faire face aux attaques sur quelque part que ce soit de nos salaires, on ne s’arrêtera pas là. Car tant qu’il y a aura le salariat, les patrons tenteront nous payer le moins possible : c’est la règle du jeu, et comme les patrons paient aussi les arbitres… Mais l’abolition pure et simple du salariat ça a une autre gueule. Si nous organisons le communisme, la gratuité, alors on aura directement la réponse à nos besoins… Et plus d’histoire d’argent, entre nous.

 

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