Depuis maintenant plusieurs mois, la direction de la CAF de Marseille a décidé de fermer ses bureaux d’accueil public pour ne plus recevoir les allocataires que sur rendez-vous, pris par un numéro surtaxé. Un avant gout de ce qui nous attend avec le plan Valls ? Commençons par examiner celui-ci de plus prêt…
L’austérité en France n’a pas attendu le dernier plan Valls de 50 milliards pour être une réalité. Ce dernier va nous toucher de plein fouet, notamment en rognant 10 milliards sur la santé et 11 milliards sur les prestations sociales ( CAF et retraites). Les précédents plans avaient déjà attaqué cette partie de notre salaire. En effet, le RSA, la CAF, les retraites ou la Sécu ne sont qu’une partie de notre salaire qui nous est reversé de manière indirecte, comme expliquée dans notre notion là dessus. ( Pour le RSA, ce n’est que partiellement du salaire indirect. Mais on reviendra là dessus à un autre moment.)
Le dernier plan Valls, comme les précédents d’ailleurs, consiste donc principalement à baisser nos salaires. L’une des mesures consiste à geler une partie des prestations sociales (en fait tout sauf les minimas sociaux). Les retraites, allocations logement, familiale ou invalidité ne seront plus indexé sur l’inflation au minimum jusqu’en octobre 2015. Pas besoin de baisser directement les salaires, l’augmentation du coût de la vie s’en charge pour eux. Approximativement ça peut faire plus d’une centaine d’euro par an en moins pour les plus pauvres. Et en plus ça se cumule d’année en année… Oui, car si officiellement ce n’est « que » jusqu’en octobre 2015, allez demander au fonctionnaires ce qui se passe quand on commence à geler les prestations : leur indice de rémunération est gelé « provisoirement » depuis… 2010.
Mais lorsque c’est un gouvernement PS au pouvoir, attaquer frontalement les prolos ça le fait pas trop. Du coup les techniques pour mettre en place l’austérité deviennent de plus en plus retords.
La combine à nanard
Petite dernière, mais toujours classique, la technique du bonneteau également appelé la combine à nanard . On prend trois gobelets, dont un avec un petit peu de thunes dedans. On mélange et pendant que le gogo cherche lequel est le bon, on lui fait les poches et on lui pique son portefeuille, sa montre et sa gourmette. C’est ce qu’a fait le gouvernement en augmentant très légèrement le SMIC en même temps qu’il baisse les « charges » qui ne sont qu’un salaire indirect. Du coup, on a un peu plus sur le bulletin de salaire alors qu’en même temps on supprime deux fois plus de salaire indirect.
En plus, comme chez les pros du bonneteau, il n’y a même pas vraiment d’argent sous les gobelets. Comme le montre cette infographie du Figaro, l’argent donné par cette augmentation du SMIC relative à l’exonération de cotisations sociales est repris par la suppression d’allocation relative à l’augmentation de salaire.
( Cliquer sur l’image pour l’agrandir)
La planète des singes.
Une autre technique de plus en plus à la mode dans l’ensemble des organismes chargés de redistribuer le salaire indirect est mise en place depuis quelques années. Celle dites des « trois singes de la sagesse ». Elle consiste pour l’État à se dire : « Si je ne vois et n’entends pas les prolos qui viennent chercher les allocations auxquels ils ont droit, je ne suis pas obligé de les leur donner ». C’est un classique de l’administration, mais depuis quelque temps, ça commence à être utilisé à grande échelle…
Par exemple, la Caisse des Allocations Familiales (CAF) est en train d’être largement restructurée dans ce sens. L’idée est simple : supprimer les points d’accueils publics. Ainsi, la CAF fait d’une pierre deux coup : elle n’est plus obligée de recevoir les allocataires à qui on a supprimé les aides, et elle limite le nombre de nouveaux arrivants.
Obligé de prendre rendez-vous via à un numéro de téléphone surtaxé (et environ une heure d’attente à la hotline soit une vingtaine d’euros), ça devrait réussir à en décourager plus d’un. Et même pour les plus courageux, si on donne le rendez-vous dans 2 mois, ça fera toujours 2 mois d’allocs en moins. De toute façon vu le nombre de postes de fonctionnaires supprimés il n’y a plus personne pour les accueillir.
L’administration est en train de tester le dispositif dans les départements où le taux d’allocataires de la CAF est le plus élevé (Marseille, Créteil) en nommant des liquidateurs avec un cahier des charges clair aux directions départementales. Si ça passe ici, ils pourront ensuite l’étendre à tout le territoire.
Fort heureusement, ça ne se passe aussi simplement que prévu, du monde gueule et commence à s’énerver, comme à Marseille où les actions se multiplient. Ainsi, à la direction départementale de la CAF où plusieurs manifestations ont eu lieu. Lundi 26 mai, le bâtiment a même été occupé (une photo de la banderole ci dessous) une matinée jusqu’à l’intervention du GIPN.
Les allocataires commencent à se mobiliser et le mouvement ne fait que commencer. (Pour les marseillais intéressés ils font des réunions tous les vendredis à partir de 18h à mille bâbords).
Cette technique n’a pas attendu le plan Valls pour être mise en place, pourtant l’idée de généraliser son utilisation. C’est d’ailleurs un des axes du plan.
Le gouvernement espère également trouver un milliard en améliorant la gestion des différentes caisses et organismes sociaux, en simplifiant les démarches, en utilisant autant que possible la dématérialisation des documents et en diminuant le personnel de ces organismes. Source, Sud-Ouest.
Du coup, supprimer l’accueil de la Caf n’est qu’un avant goût, ils vont faire pareil à la Sécu ou au Pôle Emploi. L’idée c’est que lorsque l’on se fera radié, avec ou sans motif, on ne pourra plus que gueuler devant des bornes informatiques blindés et protégés par des vigiles. Le seul interlocuteur sera le serveur du site internet qui ne pourra gérer que les problèmes les plus communs. Et on ne parle même pas des personnes qui ont des difficultés pour la lecture, ou pour surfer sur les sites administratifs. La généralisation de cette « dématérialisation des documents » est la porte ouverte à des radiations et des refus de remboursements massifs.
Ce qui est loin d’être rassurant c’est que cette technique d’austérité n’est sensé rapporter qu’un petit milliard sur les 21 milliards de coupes que veut faire l’État sur les CAF, retraites et la Sécu. Pour les trouver, pas sûr que ces mesures sournoises suffisent. Ils vont devoir salement nous attaquer… A nous de nous défendre.